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La Maison où je suis mort autrefois

Keigo Higashino

Traduction:  Yukata Makino

Edition: Acte Sud (broché) / Babel Noir (poche)

Prix: 18.30 euros (broché) / 7.70 euros (poche)

Place des libraires

256 pages

Acheté en librairie indépandante

La Maison où je suis mort autrefois
La Maison où je suis mort autrefois

Halloween oblige, j'ai décidé de m'attaquer à un livre qui fait partie de ma PAL depuis...oulala je ne compte même plus! Premièrement, sa couverture flippante avec ces deux enfants figés et amorphes m'a semblé de bon goût pour cette semaine dédiée à la fête. Deuxièmement, le résumé énigmatique m'a convaincu d'entamer cette lecture prometteuse: une mystérieuse clef, une maison en forêt, aucun souvenir d'enfance...c'est ce à quoi va se confronter Sayaka dans cet étrange roman de Keigo Higashino. Vous voulez en savoir plus? C'est par ici...

Sayaka est une femme un peu paumée. Non seulement elle n'a aucun souvenir de son enfance, est mariée à un homme qui n'ai jamais là et à une fille qu'elle maltraite. Oui dit comme ça, ça paraît brutal. Consciente d'être une mauvaise mère, Sayaka impute en partie cette absence d'amour à son défaut de mémoire. Mais une clé à tête de lion léguée à la mort de son père sonne le début d'une quête pleine d'incertitude. En demandant de l'aide à son ex petit ami, elle ne s'imaginait pas trouver une vieille demeure lugubre au cœur d'une forêt où le temps semble s'être figé à onze heure dix. Au son d'une atmosphère sinistre, on pressent qu'un drame s'est joué ici, mais lequel? Au gré des indices, le journal d'un enfant devient le témoin d'un événement passé tragique. Que s'est-il passé? Pourquoi les horloges sont toutes arrêtées à la même heure? Pourquoi le père de Sayaka possédait-il cette clef? Autant de questions auxquelles les deux amis vont essayer de répondre. Mais les réponses ne sont pas-t-elles parfois plus violentes que les questions? 

D'ailleurs, chacun n'a-t-il pas une maison où l'enfant qu'il était est mort autrefois? On fait seulement semblant de ne pas voir qu'il s'y trouve encore parce qu'on ne tient pas à le rencontrer.

Voilà un roman bien étrange, qui m'a laissé peu de répit ces deux derniers jours! Pendue aux pages et aux mots, à ce huis clos glaçant, je me suis prêtée au jeu du détective remontant les indices du passé pour en révéler le présent. Car chaque chapitre est un indice supplémentaire au pressentiment de découvrir l'impensable. Mais pas si vite, Keigo Higoshimo est un malin, un sacré farceur puisqu'il joue avec le lecteur, se baladant de manière déconcertante avec nos nerfs et notre curiosité. Mais avant ça, avec un début un peu lent, un style plutôt minimaliste et froid, il était normal de se poser des questions sur le déroulé de cette lecture. Une intrigue qui tarde un peu à se mettre en place et des personnages peu attachants m'ont conduite à penser que ce roman allait être long...que nenni! Comme une partie de pêche, il remonte tout doucement l'hameçon auquel j'ai mordu pour ne plus me lâcher, distillant par ci par là les présages d'une découverte imminente. 

Comme pour contrebalancer la distance qu'il impose au lecteur, le romancier crée une atmosphère de plus en plus pesante auquel le décor participe, avec une impression fantomatique hasardeuse laissant place à mon imagination fertile tout le loisir de se perdre.Il s'agit ici d'un roman sombre où l'angoisse monte crescendo, où les questions sont de plus en plus nombreuses et l'ambiance asphyxiante, porté par des personnages impassibles renforçant ainsi, un environnement glacial. 

Riche de sujets intéressants comme l'identité mais aussi l'image de la mère en passant par les sentiments amoureux, l'auteur réussi à l'exprimer avec une certaine pudeur et distance. Le repli sur soi des protagonistes m'a d'ailleurs complètement dérouté, participant à une singulière impression. Aborder le sujet de la maltraitance du point de vue du parent contribue à ce malaise grandissant. Toutefois, je ne peux que souligner l'intelligence des liens fait entre maltraitance et quête d'identité comme une réponse aux actes et beaucoup aimé les questions qui tournent autour du sujet "qu'est-ce qu'une mère?"

- Oui parce que de temps en temps, je me dis que ce serait mieux s elle n'existait pas.
Elle me lança un regard, les yeux rougis.
Je posai les deux mains sur le volant.
- Il paraît que toutes les mères se disent ça un jour ou l'autre. Quand elles n'en peuvent plus.
Je me demandais si elle n'allait pas s'opposer à ce que je venais de lui dire, mais elle acquiesça docilement.
- C'est vrai que parfois je n'en peux plus.
(...)
- Je ne ressens rien pour elle! s'écria-t-elle. Si au moins j'avais envie de temps en temps de la serrer dans mes bras. Je pense que les autres mères ne réagissent pas comme ça. Tu sais, il m'arrive de haïr vraiment ma fille. Tu peux croire ça?

Sous forme de puzzle de mémoire, cette recherche de soi permet de comprendre non seulement à Sayaka qui elle est aujourd'hui et également au narrateur, qui n'est autre que l'ex petit ami, de mettre une explication sur leur rupture. Une fin surprenante suite à quelques rebondissements, met en lumière l'exercice de Keigo Higashino de semer le lecteur, de se jouer de lui pour notre plus grand plaisir! Le thé noir d'Assam Kusmi Tea en fait un excellent compagnon de goût et de lecture avec un gâteau citrouille/amande.

Lecture conseillée:  Un vent de cendres, Sandrine Colette

- Tu te souviens de nos discussions à l'époque? Nous parlions de tout, mais finalement nous ne faisons rien d'autre que de nous construire contre les autres. Nous les prenions tous pour des imbéciles, nous n'avions confiance en personne, et nous pensions que nous étions les seuls à détenir la vérité.. Nous parlions souvent ainsi.

La Maison où je suis mort autrefois
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