23 Novembre 2018
Editions : Orphie
Prix : 10 euros
Où ? : Editions Orphie / Place des libraires
136 pages
Emprunté à la médiathèque
Mathilde, quarantenaire et professeure de lettres universitaire refuse l'amour. Dégoûtée par sa précédente relation, en rejet d'elle-même, elle se surprend à regarder de nouveau ce corps si désirable qui désormais lui appartient. Comme une réponse à ce désir si nouveau, elle est progressivement séduite par Damien, un de ses élèves les plus brillant, lui aussi en proie à des doutes personnels. Protecteur de Marie, sa jolie, mais néanmoins perturbée petite-amie, celui-ci brûle inexorablement de désir pour Mathilde. Trio victime de traumatismes d'enfances, ceux-ci amorcent un dialogue des corps et tentent de se réconcilier avec eux-mêmes et un passé trop encombrants. Qui de Mathilde ou Marie, Damien choisira-t-il ? Mathilde, parviendra-t-elle à s'accepter ? Marie, pansera-t-elle ses blessures ?
Au-delà de cette histoire d'amour, il faut y voir une réflexion sur le poids du passé et les conséquences des actes. A travers ces trois protagonistes et la violence infligée aux enfants comme fardeau, Isabelle Kichenin délie les langues et propose de se pencher sur l'adulte. Ou comment il est important d'appréhender son passé pour mieux construire son futur. Mieux se connaître pour, enfin, s'accepter.
L'amour apparaît alors comme une évidence inabordable, une délicieuse libération après le naufrage d'une enfance volée. A la fois poétique et violente, la délicatesse des mots choisis vibre comme une ode à la vie, une renaissance pour ces personnages où la complexité de leur situation est inscrite dans leur chaire.
Il était là, face à elles, le vieux. Dans le box des accusés. Pourtant les prisonnières, c'étaient elles. Elles le sentaient sans leurs chairs : elles avaient pris perpète. Leurs corps les enfermaient. Fermées à l'amour. Fermées aux caresses. Fermées aux cadeaux. Fermées à l'échange. Un jour il y était entré, le vieux. Et il avait laissé quelque chose en partant. Une sorte de brume grise, opaque et poisseuse.
De ces pages, on comprend que rien n'est tout blanc ou noir, mais bordé de nuances comme avec le personnage de Marie. Cette fille, qui se donne, provoque et blesse n'est-elle pas avant tout la victime d'une société sourde ? Tous jugés, mais jamais compris, Mathilde, Damien et Marie ne sont finalement que les proies d'une société engluée dans une loi du silence ayant pour principe de ne pas gêner.
De cette écriture bienveillante comme elle aime s'y adonner, l'auteure signe un premier roman réussit, humain et émotionnellement intense. Bravo !
Si vous souhaitez en savoir plus sur Isabelle Kichenin, je vous invite à découvrir son blog Wopé qui propose des ateliers d'écriture bienveillante. Une auteure engagée !
Quelle gourmandise dévorer à cette lecture ? Aujourd'hui, je propose des croquants aux amandes accompagnée d'un thé noir aux épices Kusmi Tea ! Pourquoi ? Gourmands et craquants, ces biscuits reflètent à la fois la sécheresse intérieure des protagonistes comme la sensualité extérieure qu'ils dégagent. La pointe d'épices apportée par un thé corsé exprime cette sexualité conquérante.